jeudi 26 février 2009

Pour ceux qui arrivent...


J'ai trouvé un vieux film Super-8 avec un match de foot à Wazemmes, je n'arrive pas à le dater, peut-être au début des années 70. Tous les bâtiments autour ont changé, seul le stade n'a pas bougé, il était entouré d'un grand mur et dans le fond on voit Saint Pierre/Saint Paul, c'est comme ça que j'ai reconnu le stade de wazemmes, on voit aussi la cheminée de l''ancienne usine Leclercq.
On va montrer le film, jouer du bouche à oreilles, venez le voir, peut-être vous vous reconnaitrez ou en reconnaitrez d'autres...

Dernière projection, ce SAMEDI 28 FéVRIER, entre 15h et 19h, à la MAISON FOLIE DE WAZEMMES on fera plusieurs visionnages pour retrouver la mémoire d'une coupe du soir, filmé sans doute vers 78...
En plus Sean Garnier, champion du monde de footfreestyle, ne laissera pas tomber, pendant un long long temps, le ballon...

Si vous avez vous aussi des vieilles photos, des vieux films ou des souvenirs de football à Wazemmes, ramenez-les!

Cliquez sur l'image ci-dessous pour l'agrandir...

vendredi 20 février 2009

Seul sur le terrain...



Rendez vous loupé. Personne. Porte fermée. Pas de projection aujourdhui.

Je fais le tour du terrain. Je suis seul. Au milieu. Milieu de terrain. Avec des images plein la tête, des images d'un match passé, dont la date semble se préciser et tourner autour de 1978... Je suis seul, rendez-vous loupé avec les vivants. Seul avec des images pleins la tête, d'un match passé, et dont personne ne savait qu'il en existait une bobine. Exhumée.

Sous le terrain synthétique, quelqu'un m'a dit qu'un jour ils y avaient enterré des carcasses de vieux cars de CRS rouillés qui trainaient pas loin. Le terrain s'était effondré, un coup de l'Arbonnoise soutteraine ou d'une catiches pas comblée.

Je suis seul avec ces images dans la tête, d'inconnus à la buvette, de gardiens attentifs à l'avancée de la balle, là, à l'endroit précis où je suis, ici, il y a 30 ans et des poussières, je le vois, dans ma tête, il y a trente ans, il était ici, à ma place, attendant que quelqu'un s'approche, balle au pied, pour l'arrêter dans sa course au but marqué.

J'ai une écharpe, il fait froid, un froid sec d'hiver. Dans ma cour, pas très loin, des jonquilles pointent leur nez, à moins que ce ne soit des narcisses, je ne me souviens plus, l'éclosion le dira...

Je sors l'appareil. J'attrappe un panoramique du stade. Et je rentre. Puisque personne ne veut me parler de ce temps-là, je vais questionner la matière que j'ai.

Je suis un archéologue.
Mais ne sachant ou creuser.

Dans l'atelier j'ai dessiné un arbitre présent dans le Super8, au crayon Bic, sur une page de libé titrant "L'arbitre de foot broyé par les images". Un article sur l'emploi des ralentis pour juger d'une faute... "comme si la vérité de l'image était plus vraie que celle du stade"... L'arbitre doit prendre sa décision dans le présent de l'instant, impossible de faire des arrêts sur images... Il n'a qu'un point de vue. Mais qui se doit le plus complet possible. Le plus global...

Dans ma poche, la bobine noire du film, des images arrêtées, figées. Une série de photos très petites qui se suivent et donnent l'impression d'un mouvement lorsqu'elles sont projetées les unes à la suite des autres sur l'écran. 18 images pour une seconde. Une seconde d'impressions, d'un mouvement continu dont il ne reste que 18 images... 18 images figées pour l'impression d'un geste durant une seconde...
Mais en réalité, combien d'images peut-on disséquer dans un mouvement d'une seconde?

J'ai dessiné cet arbitre sur l'article de Libé.
Une fois fini, je me suis aperçu que l'encre d'une photo au verso du journal avait reproduit l'arbitre sur une lettre qui se trouvait en dessous, comme un fantôme de l'original... Une copie, pâle, floue, de l'original...
En graphisme, ça s'appelle un transfert...

Le premier transfert d'arbitre. D'habitude c'est des joueurs...

Alors j'ai commandé un bouquin sur le transfert, aux Presses Universitaires de France: "Le transfert. Une étude Psychanalitique". J'allais enfin comprendre quelquechose aux mécanismes inconscient du foot.
Mais aussi de ma démarche...
Puisqu'il parait que le transfert c'est aussi, et justement, une histoire de projection...

mardi 17 février 2009

Notes d'ailleurs


Un beau projet de Pascal Truchet, la réécriture, avec ses éléves, d'un match vécu....
( en cliquant sur le titre de ce chapitre, un lien se fait vers un reportage télé sur le sujet. Le livre, lui, est disponible via ce blog http://pascaltruchet.over-blog.com/)

"Ecrire, c’est d’abord oser écrire. Comment et pourquoi construire un texte quand on a choisi une filière où le français n’est pas a priori la priorité, où trouver l’impulsion quand on traîne derrière soi des années de disette lexicale, comment assumer des heures passées à choisir des mots quand les notes accumulées laissent le sentiment âpre de l’échec ? Que penser de ce cinglé qui débarque à la rentrée et qui proclame haut et fort, content de lui, que non seulement nous, les réfractaires à la littérature, nous allions apprendre par cœur du Ronsard, du Saint-Amant, du Nerval et du Verlaine, mais qu’en plus, nous allions créer un livre ? Un livre… ! Pourquoi pas faire des phrases correctes tant qu’on y est ! Seize ans que je me bats pour ne pas appliquer les règles les plus élémentaires, pour envoyer bouler les accents et autre accord du participe passé conjugué avec l’auxiliaire avoir, pour enfermer à triple tour dans les oubliettes de la mémoire les mots de plus de deux syllabes, alors même que la victoire semblait proche, la ligne d’arrivée bien en vue, la dernière année de résistance amorcée, et il croit, lui, que je vais participer à… un livre ! Cause toujours…

Bien. Un peu de silence s’impose. L’écriture comme la lecture a besoin d’espace pour s’exercer, le calme d’avant le match. Revenons ensemble à quelques vérités que notre société semble avoir trop souvent oubliées.
Il est dangereux de s’exprimer pour deux mais j’ose affirmer que, Manu et moi, nous travaillons dans la conviction que la joie a besoin de l’entente du corps et de l’esprit pour voir le jour, que la connaissance n’est en rien réservée à une élite, que les plus grands textes n’ont pas été écrits pour une filière scolaire ou un arrondissement privilégié, que c’est par l’exigence qu’on obtient de grands résultats, qu’il n’y a aucune pertinence à opposer manuel et intellectuel, qu’on peut vivre la ferveur d’un match de foot puis se délecter, la nuit venue, à la lecture d’un bon roman, qu’aucune part de ce qui constitue la vie n’échappe à l’écriture, que le plaisir est bien plus savoureux lorsqu’il est précédé d’un effort, que la victoire sur le terrain vert ou face aux buts du langage nécessite une entraide salvatrice et réconfortante, que l’écriture et le sport demandent des qualités semblables, l’honnêteté, l’énergie, l’acceptation de ses qualités et défauts, que ce sont deux apprentissages parfois douloureux, parfois euphorisants, lesquels réclament endurance et ténacité, entraînements répétés dans l’attente de la confrontation aux autres - joueurs ou lecteurs - qui se fait, au final, confrontation à soi-même.
Emmanuel Daguet, c’est le contraire du cliché, c’est un sportif qui lit, qui réfléchit, qui médite, qui philosophe. Une culture physique et littéraire en somme. Quant à moi, je suis (en toute modestie !) le génie littéraire autoproclamé du siècle naissant et je fais semblant d’être sportif. Un duo prometteur en somme. Alors oui, organisons un match de football, rendons-les sensibles à leurs émotions, travaillons la focalisation, mettons en scène, alignons-les, filmons-les, photographions-les, rendons-les compléments d’objet direct, complémentaires, qu’ils se prennent pour des Zidane, des Pelé, des Rimbaud ou des Lautréamont, cessons de nous mentir, toute réalisation est d’abord une conception, une forme trouble de rêve éveillé qui décuple l’énergie et donne l’impulsion de frapper dans la balle pour faire se lever les foules et les phrases.

Ecrire, c’est donner de la voix et le livre devient tribune, c’est affûter ses stylos comme on chausse ses pointes, c’est mobiliser ses connaissances qui sont des équipiers fidèles, c’est inventer le geste inédit qui surprendra l’adversaire et le lecteur, c’est accepter l’effort pour la beauté du jeu, c’est faire le spectacle, s’égosiller de rage ou d’émerveillement devant une action ou une métaphore, c’est planifier ses idées, élaborer une tactique, faire le point, reprendre son souffle, maîtriser la peur de ne pas être à la hauteur, croire en soi. Ecrire, c’est doser subtilement la retenue et l’engagement, la réflexion et l’instinct, la tradition et la création, la répétition et l’innovation pour, dans un instant de grâce, accomplir le miracle inespéré et pourtant désespérément attendu d’un ballon propulsé au fond d’un filet, d’un récit projeté au fin fond d’autres entrailles.

Un jour, par hasard, dans dix ans, vint ans, peut-être plus, vous retrouverez, un peu jauni, poussiéreux, sur une étagère encombrée, cet ouvrage que vous aviez oublié. La tentation sera alors grande de l’ouvrir à nouveau, de redécouvrir ces mots qui étaient les vôtres et que vous aviez patiemment assemblés, ce langage qui depuis lors aura évolué, ces photos qui conserveront à jamais le souvenir des visages heureux, fatigués ou résignés, d’un matin glacial de l’année 2008. Vous retomberez peut-être alors sur ces phrases, et c’est votre passé avec ses naïvetés, ses espoirs et ses imperfections que vous vous prendrez en pleine face, dans le sentiment démultiplié que quelque chose a alors été accompli, que vous n’étiez pas si seul, un sentiment bizarre s’emparera alors de vous, sorte de nostalgie peut-être, amusement de l’adulte confronté à celui qu’il était alors, le temps aura passé, le corps ne sera plus le même, le regard sera mieux aiguisé, le cœur davantage chargé, mais, quelle que soit alors votre vie, des voix et des visages familiers surgiront de l’oubli et, le temps d’une lecture, le cercle des footeux disparus se reformera… "