vendredi 20 février 2009

Seul sur le terrain...



Rendez vous loupé. Personne. Porte fermée. Pas de projection aujourdhui.

Je fais le tour du terrain. Je suis seul. Au milieu. Milieu de terrain. Avec des images plein la tête, des images d'un match passé, dont la date semble se préciser et tourner autour de 1978... Je suis seul, rendez-vous loupé avec les vivants. Seul avec des images pleins la tête, d'un match passé, et dont personne ne savait qu'il en existait une bobine. Exhumée.

Sous le terrain synthétique, quelqu'un m'a dit qu'un jour ils y avaient enterré des carcasses de vieux cars de CRS rouillés qui trainaient pas loin. Le terrain s'était effondré, un coup de l'Arbonnoise soutteraine ou d'une catiches pas comblée.

Je suis seul avec ces images dans la tête, d'inconnus à la buvette, de gardiens attentifs à l'avancée de la balle, là, à l'endroit précis où je suis, ici, il y a 30 ans et des poussières, je le vois, dans ma tête, il y a trente ans, il était ici, à ma place, attendant que quelqu'un s'approche, balle au pied, pour l'arrêter dans sa course au but marqué.

J'ai une écharpe, il fait froid, un froid sec d'hiver. Dans ma cour, pas très loin, des jonquilles pointent leur nez, à moins que ce ne soit des narcisses, je ne me souviens plus, l'éclosion le dira...

Je sors l'appareil. J'attrappe un panoramique du stade. Et je rentre. Puisque personne ne veut me parler de ce temps-là, je vais questionner la matière que j'ai.

Je suis un archéologue.
Mais ne sachant ou creuser.

Dans l'atelier j'ai dessiné un arbitre présent dans le Super8, au crayon Bic, sur une page de libé titrant "L'arbitre de foot broyé par les images". Un article sur l'emploi des ralentis pour juger d'une faute... "comme si la vérité de l'image était plus vraie que celle du stade"... L'arbitre doit prendre sa décision dans le présent de l'instant, impossible de faire des arrêts sur images... Il n'a qu'un point de vue. Mais qui se doit le plus complet possible. Le plus global...

Dans ma poche, la bobine noire du film, des images arrêtées, figées. Une série de photos très petites qui se suivent et donnent l'impression d'un mouvement lorsqu'elles sont projetées les unes à la suite des autres sur l'écran. 18 images pour une seconde. Une seconde d'impressions, d'un mouvement continu dont il ne reste que 18 images... 18 images figées pour l'impression d'un geste durant une seconde...
Mais en réalité, combien d'images peut-on disséquer dans un mouvement d'une seconde?

J'ai dessiné cet arbitre sur l'article de Libé.
Une fois fini, je me suis aperçu que l'encre d'une photo au verso du journal avait reproduit l'arbitre sur une lettre qui se trouvait en dessous, comme un fantôme de l'original... Une copie, pâle, floue, de l'original...
En graphisme, ça s'appelle un transfert...

Le premier transfert d'arbitre. D'habitude c'est des joueurs...

Alors j'ai commandé un bouquin sur le transfert, aux Presses Universitaires de France: "Le transfert. Une étude Psychanalitique". J'allais enfin comprendre quelquechose aux mécanismes inconscient du foot.
Mais aussi de ma démarche...
Puisqu'il parait que le transfert c'est aussi, et justement, une histoire de projection...

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